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La Famenne et les Ardennes

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 Tandis que les Ardennes mêmes forment un véritable haut plateau pouvant culminer jusqu'à 670 m, à l'ouest, entre le Condroz et les hauteurs ardennaises, se trouve une large dépression ayant de 150 à 250 m d'altitude, qui  forme une transition vers cette région  particulièrement riche en forêts.

Mais alors qu'on peut parler du type de ferme ardennais, il n'en est pas de même pour la Famenne: l'influence des fermes fermées du Condroz se fait sentir particulièrement dans la partie occidentale de la région, tandis que la limite orientale a subi l'influence des fermes ardennaises à un seul bâtiment.

Pour pouvoir comprendre quelque peu les activités agricoles des Ardennes, il faut étudier le sous-sol et la constitution du sol de ce magnifique territoire naturel. Dans les Ardennes, les points culminants se composent de roche dure et les vallées érodées de schiste plus tendre; dans la Famenne, on trouve des formations calcaires sur les dos des collines, recouvertes souvent d'une couche de limon d'origine éolienne. Cette composition du sol est importante tant pour les matériaux de construction d'usage local que pour l'agriculture, tant ancienne que moderne de la région. Premièrement, la culture n'est possible que sur des parcelles relativement planes, pas trop en pente. De tous temps donc, les hauts plateaux furent réservés aux cultures et ce, aussi bien en Famenne que dans les Ardennes, les hauteurs étant plus fertiles que les flancs, en général boisés. Mais la Famenne n'est pas seulement une région moins élevée; ses terres de culture se composent d'argile lourd mais peu profond, devenant tout aussi vite trop humide ou trop sec, tandis que les plateaux ardennais sont plus sablonneux, mais la couche est plus profonde.

Depuis des siècles, l'agriculteur ardennais a dû se battre contre une série d'éléments défavorables: la composition pierreuse du sol, le drainage souvent insuffisant et le terrain tourbeux  (dans les Hautes Fagnes, par exemple), les différences d'altitude, un climat très rude et une fertilité du sol sans comparaison avec celle de Hesbaye ou du Condroz. Par conséquent, cette vaste région n'est que peu peuplée, ce qui réduit les débouchés pour les produits. Il n'est donc pas étonnant que les méthodes agricoles n'aient Pas atteint ici le même degré d'intensification qu'en Flandre: jusqu'au XIXe siècle, certaines terres, les terres à sart étaient toujours cultivées selon le principe de l'utilisation des herbes sauvages, tandis que les terres à champs étaient dé) à amendées depuis longtemps à l'aide de l'engrais de 'l' herdage', selon une méthode évoluée donc. Ce type d'amendement fonctionnait, en Ardennes, suivant deux systèmes différents. Dans le système de l'écobuage, les mottes de terre sont arrachées avec les herbes et les racines, puis séchées, brûlées, les cendres étant ensuite réparties sur les terres, permettant de gagner l'année suivante une récolte de blé et parfois, une deuxième récolte d'avoine. Dans la deuxième méthode, celle de l'essartage, les broussailles sont arrachées pour obtenir une récolte l'année suivante. Mais ensuite, la terre a besoin de plusieurs années pour 'récupérer' et les broussailles réapparaissent. Un autre système, moins éreintant pour la terre, consistait à exploiter en commun les terres entourant le village, les 'communes', le bétail du village pouvant paître sur l'herdage  c'est-à-dire les prés du village. L'engrais produit par ce système était utilisé, en même temps que le fumier d'étable par les fermes proches du village, afin de permettre la culture des céréales sur les terres communes. Malheureusement, les bois servaient aussi de pâturages: une grande superficie de forêts fut ainsi ruinée par le bétail d'abord communautaire, puis privé. Selon Lindemans, le système de l'herdage fut toujours utilisé, même lorsque les troupeaux communs furent supprimés et ce, tant que les villageois purent disposer des terres communes. Petit à petit cependant, la superficie des terres communes fut réduite pour faire place à des terres de culture privées, utilisées de manière plus intensive. C'est surtout au cours du siècle dernier que cette évolution se fit et de nouvelles plantes furent introduites à cette époque, telles que le tabac dans la région de la Semois. Ces nouvelles plantes furent d'abord testées et, devant le succès obtenu, cultivées ensuite à grande échelle suivant des méthodes plus rationnelles.

En raison de ces anciennes méthodes d'agriculture et de la composition du sol, il n'était pas nécessaire de prévoir de grandes granges et de vastes étables comme dans les régions limoneuses. Une modeste étable pouvant abriter 4 à 8 bêtes (de taille réduite, comme en Campine à l'époque) suffisait. Il fallait également une grange relativement importante, pour entreposer le foin devant nourrir le bétail pendant la longue période d'hiver. D'autre part, les paysans ardennais élevaient également jadis des moutons, surtout pour la production de laine devant servir à leur usage personnel. Il fallait donc aussi prévoir un abri pour les bêtes et pour leur nourriture en hiver. Mais le volume total nécessaire pour loger les hommes et le bétail, ainsi que pour entreposer la récolte et les instruments, pouvait être placé sous un seul toit. Une autre particularité des fermes ardennaises consiste en leur subdivision en profondeur, un seul étage étant construit, jusqu'au début du XXe siècle.

Par conséquent, le plan de ces fermes est plutôt carré et subdivisé en longues sections, le toit ne devant recouvrir qu'un seul étage, de sorte qu'une faible pente suffisait. Cette subdivision se reflète dans la répartition des différentes parties de la ferme: la première 'section' est occupée par l'habitation, la deuxième par les étables, la troisième par la grange et la quatrième, éventuellement, par la bergerie. Ainsi, toute la lumière qui devait pénétrer dans la partie habitée l'une  derrière l'autre, la lainerie, la cuisine, la 'chambre'  comparez avec la ferme de Campine et la buanderie) venait d'une façade latérale. Selon M. Lefèvre, ceci explique, du moins partiellement, le fait que la plupart des maisons ardennaises n'ont pas de mur mitoyen d'un côté et sont donc plus ou moins séparées les unes des autres, et non construites en rangées .

Le système des terres de culture  communes a également influencé l'implantation des fermes ardennaises: en général, elles sont concentrées en un endroit, comme pour se protéger les unes des autres en cas de difficultés; quelques fermes ainsi groupées ont une apparence de hameau, ou même de village.

La plupart des fermes ardennaises qui existent encore de nos j ours, n'ont conservé que des traces de ces différentes caractéristiques. Une des transformations courantes consiste à rehausser la partie habitée afin d'y aménager des chambres à coucher formant un étage. Les habitations plus récentes (c'est-à-dire du début du XXe siècle) possèdent un véritable étage, la division en trois 'sections' étant maintenue, du moins dans le plan d'origine. Le XXe siècle condamna cependant beaucoup de ces fermes typiques du XVIIIe  ou XIXe siècle: tandis que de nombreux bâtiments agricoles succombèrent pendant les deux guerres (surtout dans la région de Bastogne), l'urbanisation et la mode des maisons de campagne porta le coup mortel aux fermes restantes. Mais heureusement, il y eut aussi de nombreux exemples de restaurations soignées.

Les matériaux de construction utilisés par les paysans ardennais varient selon les régions et reflètent la composition du sol. Là où ils ne trouvaient que du schiste, ils devaient choisir entre cette pierre, la terre glaise et le bois pour les murs, le toit étant couvert de chaume. Ailleurs, le grès était utilisé pour les murs, tandis que les toits étaient faits de tuiles ou de grandes ardoises.

Ces différents matériaux se retrouvent encore de nos jours dans la région de Malmédy et de Saint-Vith.  Le géographe Clément distingue quatre types de fermes: le type A, correspondant presque parfaitement au type ardennais que nous avons décrit, à savoir, des fermes sans étage, divisées en sections profondes, avec de nombreuses fenêtres dans la façade latérale; il note également qu'à la limite des Hautes Fagnes, les fermes sont protégées par de hautes haies de charmes. Toujours suivant cet auteur, le type B serait caractérisé par la présence d'un étage, par des murs extérieurs chaulés et de larges encadrements de pierre bleue ou de maçonnerie aux fenêtres et aux portes. Il est cependant difficile, même pour l'auteur, de savoir jusqu'à quel point il s'agit véritablement de deux types différents (le type B étant une transition vers le type de fermes que l'on rencontre en Allemagne centrale) ou de transformations (chambres à l'étage) effectuées par un paysan plus riche, à la recherche d'un peu plus de confort. Comme troisième type, il prend les constructions ayant des Joints blancs entre les gros blocs de pierre naturelle utilisés. Et enfin, le type D rassemble lesfermes à  colombage que l'on rencontre principalement dans les villages de Meiz, Ligneuville,  Bellevaux  et Rocherath.

Ce type de colombage se caractérise souvent par des façades divisées en panneaux carrés (distance égale entre les poteaux et entre les poutres horizontales), comme c'est souvent le cas dans les Ardennes centrales, la région des prairies, la région de la Voer et le Limbourg néerlandais. La 'maison paysanne' de la région de la Voer, provenant de 'De Plank ' à Sint-Martens Voeren et que l'on peut visiter à Bokrijk, date probablement du XVIle  siècle et est aussi construite de cette façon. L'ancienne 'Maison du Prévôt', devenue l'Auberge  du Prévôt (datant du milieu ou de la seconde partie du XVIIIe siècle), provenant des Ardennes centrales et reconstituée au 'Musée de la vie rurale en Wallonie' à Saint-Hubert, possède aussi ce genre de colombage.

Ce même musée réunit toute une série d'autres maisons à colombage, et permet de se faire une image de la maison paysanne wallonne et ardennaise surtout, construite) jadis  en bois, en terre glaise et en chaume principalement, plutôt qu'en pierre naturelle comme pourraient le laisser supposer les exemplaires  de fermes de ces régions qui subsistent de nos jours. Nous y découvrons d'autres types de colombage, comme celui de la ferme de Malvoisin,  provenant des Ardennes centrales, et construite suivant le plan en sections, les trois fonctions: logis, étables et grange, étant séparées. Mais dans ce cas, le colombage est du type rectangulaire: la distance entre les piliers verticaux est supérieure à celle qui sépare les poutres horizontales.

Le treillage (brindilles passées dans les lattes) se fait selon la même technique que dans le Limbourg méridional et en Allemagne: les brindilles sont passées horizontalement entre les lattes placées verticalement, grâce à de petits trous et des fentes prévus à cet effet dans les poutres horizontales; les lattes sont donc ici placées entre les piliers, de sorte que les poutres de l'ossature restent visibles. La façade occidentale de nombreuses maisons de terre glaise est également caractéristique: dans cette région aussi, il fallait préserver les murs de terre contre les pluies torrentielles qui les 'rinçaient' fréquemment. Pour bénéficier d'un maximum de chaleur, la façade avant était aussi tournée vers le soleil, une des façades transversales était donc obligatoirement orientée à l'ouest et constamment fouettée par la pluie et le vent. Il fallait donc la construire solidement: on l'enduisait d'une couche d'argile très épaisse, dans laquelle on piquait de petits brins de paille dirigés vers le bas. Si nous repensons aux habitations néolithiques, telles qu'elles furent découvertes lors des fouilles dans le Limbourg méridional, ces constructions vieilles de plus de 6.000 ans, nous devons reconnaître que cette disposition en trois parties, orientée dans une certaine direction, résiste bien à l'épreuve du temps.

Une autre particularité assez fréquente dans la partie orientale des Ardennes et qui vaut la peine d'être mentionnée, consiste en la présence d'un grenier à foin :  comme dans les fermes du pays de Herve, le foin est entreposé au-dessus de l'étable. Mais un autre élément intéressant du point de vue architectural est la 'rampe', qui permet aux chars à foins de pénétrer directement dans le grenier, où le foin entassé forme une épaisse couche isolante pour les habitants et le bétail. Bien que la carte donnée par Tréfois  ne soit pas rigoureusement exacte, sa conclusion semble être juste: 'on ne peut pas parler de pur hasard, lorsque les limites de la région des fermes avec grenier à foin en Haute Belgique correspondent au tracé de la zone où sévit le climat le plus rude. C'est dans cette région en effet qu'il gèle le plus de jours par an (120-140).  Parfois, l'emplacement d'une ferme était choisi de telle façon sur le dos d'une colline que l'usage d'une rampe était superflu: le char pouvait avancer jusqu'à l'étable par derrière, du côté du flanc le plus élevé, la façade avant et les accès au logis, aux étables et à la grange étant placés de l'autre côté de la colline. Et pour prouver le caractère éternel de la richesse d'invention du paysan bâtisseur (qui a 6. 000 ans d'histoire derrière lui), mais aussi son caractère international, il suffit de rappeler la présence de rampes parfaitement identiques quelques centaines de kilomètres plus loin, en Auvergne et dans le Limousin en France, dans la Forêt Noire en Allemagne; dans l'est de la Suisse ou en Autriche...